Histoire : La vie rêvée (Chapitre 1) (M/F)

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Histoire ajoutée le 27/04/2015
Épisode ajouté le 27/04/2015
Mise-à-jour le 03/07/2021

La vie rêvée (Chapitre 1) (M/F)

Bonjour à tous,

Je reviens vers vous après deux ans d'absence pour finir ce que j'avais commencé avec "The Serial Tickler", mais également pour lancer cette nouvelle histoire dont j'ai eu l'idée cette nuit.

Cependant, ayant prouvé mon inaptitude à poster régulièrement pour une histoire longue, celle-ci sera certainement beaucoup plus courte. Comme pour "The Serial Tickler", je sais quelle fin je veux, et comment je veux y arriver à peu près, le seul souci consiste à rédiger les étapes.

Soit dit en passant, cette histoire sert à présenter le concept de l'histoire, donc n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez, que je sache si ça vaut le coup que je poste la suite ou pas.

Je vous souhaite une bonne lecture, et j'espère poster la suite assez vite

1.



Tout commence dans un futur proche, au crépuscule, dans l'humble demeure d'un homme désespérément banal : Thomas. Il est âgé de 87 ans, et sent sa dernière heure arrivée depuis bien trop longtemps. Mais elle se fait attendre. Il se traîne péniblement dans sa demeure, où la vie n'est plus qu'une accumulation d'ombres. Celle de sa femme décédée, Agnès ; celles des enfants qu'il n'a jamais eu ; celles des animaux domestiques qui ont pu accompagner cet homme tout au long de sa vie ; celle des cheveux qu'il avait encore il y a 10 ans ; celle de la vue qu'il perdit petit à petit après le passage de la quarantaine ; celle de la vie qui l'animait avant qu'il devienne veuf.

Mais maintenant, il n'y a plus personne à part cet honnête commerçant, qui a revendu son épicerie depuis bien longtemps. Des milliers de clients y ont afflué au fil des ans, mais pas plus. Cela ne vient pas d'un mauvais esprit commercial, mais juste du fait que l'établissement était modeste, et situé dans un patelin dont la tranquillité est ce qui a poussé Thomas et sa femme à y emménager, à l'époque. Mais au final, avec le temps, ils y ont dépéri. Et alors qu'on pourrait penser qu'une vie tranquille permettrait de vivre plus vieux, l'âge qu'ont atteint les deux tourtereaux n'a rien d'exceptionnel en cette époque.

Que reste-t-il de tout cela au final ? La maison du vieil homme semble subir elle aussi les affres du temps. Non pas qu'elle ne soit pas entretenue, mais le papier décorant chaque pièce, les meubles en eux-même, les draps, les rideaux, la voiture qui vieillit paisiblement au garage, les vêtements de Thomas, tout cela est clairement d'une autre époque.

Dans sa maison, pas l'ombre d'un ordinateur, une télé à écran cathodique, un vieux poste/radio/cassette et CD, des horloges mesurant quasiment 2 mètres de haut, dont le tic-tac incessant ne s'est jamais arrêté en 50 ans. La moquette de la chambre semble avoir été posée en même temps que la maison fut bâtie, ce qui est peut-être le cas d'ailleurs, et pourtant, la poussière ne s'y est pas tant installée que ça. La vieille baignoire brille par sa blancheur, la Citroën AX est encore en excellent état, et pourtant, elle affiche plus de 80 000 kilomètres, ce qui n'est pas tant que ça pour une voiture âgée de 30 ans.

Oui, Thomas est encore actif, il prend soin de ne rien laisser à l'abandon, même maintenant, alors que ses forces le quittent, que sa cuisine a été réduite à une table et une chaise, depuis que ce sont des infirmières qui lui apportent son plateau repas quotidien. Il vit sa petite existence de petit vieux qui attend la fin, sans pour autant chercher à la presser.

Tout est prêt : Les vêtements sont repassés, la maison est rangée, et propre de fond en comble, son unique habitant ayant pour habitude de prendre une place fixe lorsqu'il passe d'une pièce à l'autre, et ne recevant que très peu de visites. Les factures sont réglées sans problème par sa retraite, et son testament est rédigé depuis plusieurs années déjà. Comme aucun nouvel élément n'est arrivé dans la maison, Thomas n'a rien de plus à léguer que ce qu'il possédait déjà à l'époque de sa rédaction. Et puis de toute façon, qu'a-t-il tant à léguer ? Du mobilier pour ses cousins, la seule famille qui lui reste, mais qui se font aussi rares que les promenades dans le parc voisin, et c'est tout.

Après avoir bu sa soupe, laquelle laisse une agréable odeur de légumes poêlés dans toute la maison, Thomas monte les escaliers à son rythme : Pourquoi se presser pour rien ? Ce n'est pas son genre, ça ne l'a jamais été, il suffit de voir le village dans lequel il s'est installé. Deux centaines d'habitants, une moyenne d'âge d'environ 55 ans. Les seuls rires d'enfants qu'on peut y entendre arrivent les week-end, et l'été, lors des visites chez grand-père et grand-mère. L'épicerie fonctionne toujours, le jeune couple qui l'a reprise finira sûrement comme le précédent. Bref, la vie s'écoule lentement, et elle ne risque pas de s'emballer.

Thomas arrive finalement dans sa chambre. Le dos voûté par les années, il pose sa vieille canne en bois qui le soutient sans fléchir, contre sa table de chevet. Il se met sous la couverture, et regarde, comme un rituel, la photo de sa femme qui le regarde et veille sur lui dans son sommeil. Il retire son dentier, puis ses lunettes, et éteint la lumière, sans aucune lecture, sans aucune prière. Il est déjà paisible, alors il n'a pas besoin d'oublier les tracas de sa vie. Il sait qu'il est prêt, il ne redoute pas la mort, alors il peut l'accueillir à bras ouverts. Et alors qu'il aurait pu, comme il a toujours fait depuis des années, se reposer et se réveiller au petit matin, il n'ouvrira plus jamais yeux. Ses battements de cœur étaient déjà lents, il a fini par s'arrêter...

Que se passe-t-il lors de cette étape de transition ? Ce n'est pas vraiment descriptible. Un passage du noir au blanc, en passant par tout le spectre des couleurs. Des visions qui pourraient s'apparenter à des tissus colorés, que l'on traverserait comme si on flottait dans l'espace et le temps. C'est un tunnel sans aucune limite visible, mais on le devine parce que l'on avance tout droit, aucun virage, aucun obstacle ne vient perturber cette course. Mais course contre quoi ? S'agit-il de l'équivalent de la course des spermatozoïdes pour atteindre l'ovule, et ainsi créer la vie ? Est-ce que cela n'est qu'une hallucination créée par le cerveau, pour oublier une potentielle douleur ?

Au final, qu'importe, Thomas la suit. Il s'aperçoit que ses courbatures ont disparu, sont dos ne semble plus voûté, ses yeux voient nettement. Il a la sensation qu'il pourrait à nouveau marcher sans aucun appui, pourtant, il est toujours aussi âgé. Cela ne le réjouit pas spécialement malgré tout, il est dans une sorte d'état second, et cette conviction que plus rien ne pourra l'atteindre sur la Terre. La seule conclusion qui lui vient, c'est qu'il n'y est plus. C'est maintenant qu'il prend conscience de sa mort physique, que le voyage s'arrête.

Il est à nouveau dans sa maison, assis à la table de sa cuisine, cette table en bois sur laquelle se sont déroulés tant de repas. Il peut d'ailleurs voir les quelques traces de couteaux qui ont entaillés ce support. Il tourne la tête, tout est redevenu comme il y a quelques années : Les placards sont les mêmes, mais on rajeuni. Le frigo est flambant neuf, la gazinière, le lave-vaisselle, le lave-linge, la vaisselle, tout est impeccablement rangé, et propre. Là encore, Thomas ne s'en réjouit pas spécialement, il semble avoir perdu la capacité de s'émerveiller, aussi incroyable que cela puisse paraître.

Son corps a retrouvé la forme de ses 35 ans : c'est un jeune homme brun , coiffé à la militaire , les yeux marrons ; avec une petite cicatrice sur la joue gauche ; au physique banal, habillé simplement d'un T-Shirt blanc, et d'un pantalon beige, avec une ceinture en cuir de la même couleur que ses yeux, et des chaussures noires en cuir. Il regarde ses mains : Les veines ne ressortent plus autant, sa peau est plus claire, ses bras plus musclés. Comme pour vérifier son état, il porte sa main droite sur son cœur, et là... Rien. Pas un battement. Il n'a jamais paru aussi vivant, mais il ne l'est pas pour autant. Là encore, aucune vraie déception, Thomas reste impassible, pourtant, sa situation pourrait sembler désarmante.

C'est alors que la poignée de la porte de la cuisine se tourne. Il l'observe. On pourrait penser que c'est sa femme qui va entrer, mais au fond de lui, il sait que ce n'est pas ça. Le temps semble long. Il s'aperçoit alors que l'horloge de son salon est située contre le mur de la cuisine, et qu'elle marche parfaitement, poursuivant son « tic-tac » sans languir. C'est d'ailleurs à ce moment là que Thomas s'e rend compte qu'aucun autre son n'est audible. Seul reste le bruit du balancier, qui s'est tellement inscrit dans sa tête lors de ses dernières années d'existence, qu'il semble être tout ce que le vieil homme a gardé en mémoire auditive. La porte s'ouvre enfin, lentement, mais sûrement, elle ne s'arrête pas avant de toucher le frigo.

C'est un adolescent qui était derrière. Thomas le reconnaît instantanément : Cheveux bruns, les yeux marrons... Et une cicatrice identique sur la joue gauche. C'est lui quand il avait 17 ans.


Les deux se regardent fixement, avec ce même air neutre, c'en est presque comique, à croire que Thomas n'a jamais été souriant, peut-être est-ce le cas après tout... Après quelques minutes sans aucun mouvement, l'adolescent avance jusqu'à la table, et s'assoit en face de son équivalent trentenaire, sans que la chaise ne grince, sans que le moindre bruit se fasse entendre. Un nouveau jeu de regard commence. Aucun son ne sort de leur bouche. Le face à face dure un peu, avant que finalement, l'adulte finisse par demander :

« -Que me veux-tu ? »

Le jeune ne répond pas, il n'esquisse aucun mouvement, il attend sagement. Après quelques secondes, il tente une autre question :

« -Je suis mort, n'est-ce pas ? »

Là encore, aucune réaction.

Mais quelques secondes plus tard, l'horloge sonne, alors l'adulte tourne sa tête : Il est 14h17. Pourquoi est-ce qu'elle sonne ? Ce mystère ne le rend pas plus expressif.

Lorsqu'il tourne à nouveau la tête, l'adolescent est debout, devant la fenêtre, il regarde fixement quelque chose dehors. De loin, on croirait que c'est juste l'horizon. Le trentenaire se lève alors à son tour, et se poste à côté de lui. C'est alors qu'il s'aperçoit que ce n'est pas son jardin qui se trouve dehors, ce n'est pas sa cour avec son banc, son arbre, mais c'est un tout autre décor qui s'offre à lui...

Il voit la maison de Géraldine, une jeune fille dont il était très proche à 17 ans, il en était même amoureux, et ce sentiment semblait réciproque. La demeure se situe à la campagne, une grande maison en pierres et en bois, qui semble construite pour résister aux siècles, même si l'avenir aura prouvé le contraire.

Un pré immense s'étend derrière. Bien plus grand qu'il ne l'était en vrai. Mais de toute façon, l'horizon est flou : on ne voit que le ciel, on devine quelques nuages passagers, pas l'ombre d'une vie animale. En revanche, ce que Thomas distingue bien, c'est la balançoire, sur laquelle une adolescente est assise. Les cheveux blonds pris au vent, avec un petit ruban noir, des yeux bleus, des petites et rares tâches de rousseur au-dessus du nez et sous les yeux, à peine visibles de loin. Un haut léger, idéal pour l'été, un jean, et une paire de tong aux pieds, révélant de jolis pieds de taille 36, dont les fins orteils sont vernis de rouge.

À côté d'elle, Thomas adolescent prend place, il est assis par terre, il la regarde, puis tourne la tête en direction de sa version adulte. Lequel n'est plus du tout dans sa maison, mais bien dans le décor avec les deux jeunes gens. Il regarde, l'air perdu, cachant un regret évident.

L'adolescent se met alors à lui parler ; Géraldine, quant à elle, ne réagit pas, elle semble sourde à la conversation, et aveugle à la présence du Thomas trentenaire, quand bien même ses jambes bougent, et son balancement est constant, de la même manière que le balancier de l'horloge :

« -Te souviens-tu de ce jour ?
-... Oui... Je m'en souviens. Il y en a eu d'autres d'ailleurs, des journées similaires... »

Le jeune baisse alors la tête dans un sourire un peu narquois, avant de relever la tête à nouveau :

« -Et te souviens-tu de ce moment là ? »

C'est alors que le temps semble reprendre, les bruits d'oiseaux invisibles se font entendre, un léger vent fait flotter les brins d'herbe, et les cheveux de Géraldine. Le jeune Thomas la regarde, et son regard se dirige ensuite vers ses pieds chaussés de petites tong bleues, dont les talons se détachent continuellement, seul le bout des orteils effleure le sol.

L'adolescente est pensive, elle tourne la tête vers son ami, et lui dit en riant :

« -T'es bizarre quand même !
-Pourquoi ?
-Je sais pas. Souvent, quand je te regarde après un long silence, tu as systématiquement les yeux rivés sur le sol...
-Ah oui ? - demande-t-il en relevant la tête - pourtant je...
-En fait, ce n'est même pas le sol. J'ai l'impression que ce sont mes pieds que tu regardes... »

Un silence envahit alors la plaine. Les oiseaux ne chantent plus, le souffle du vent est inaudible. Cette question avait mis Thomas dans un tel embarras à l'époque, que le monde autour semblait ne plus exister, il était focalisé sur ce que Géraldine venait de lui demander. Il rougit, garde la bouche ouverte, essaie de trouver quoi répondre.

L'adulte regarde ça avec pitié, car il se souvient exactement de ce qu'il a répondu. Et même si Géraldine ne va entendre que l'adolescent, ce sont bien les deux versions qui parlent en même temps :

« -Non, pas du tout, je regarde juste le sol, parce que je ne sais pas quoi dire... C'est tout... »

Le son de la nature reprend, Géraldine a arrêté de se balancer. Elle le regarde en souriant :

« -Ah bon ? Tu es sûre ? Tu sais, je ne dis pas ça pour t'embêter, ça ne me dérange pas. Je trouve même ça plutôt mignon !
-Ah oui ? - Il sourit, agréablement surpris par cette phrase, mais il se rattrape immédiatement - pourtant, je t'assure, je ne regardais pas tes pieds. J'avais juste une sorte... D'absence. »

Géraldine penche la tête tout en continuant de le regarder, et conclut en souriant :
« -...D'accord, je te crois ! »

Elle recommence à se balancer, le bruit résonne à nouveau comme celui du tic-tac, et les chants des oiseaux sont de plus en plus fort, auxquels se rajoutent les paroles de Géraldine, le tout devenant une cacophonie assourdissante, poussant le Thomas adulte à se couvrir les oreilles, avant de crier, la tête tournée vers le ciel :

« -Assez !!! »

L'adolescent tourne la tête vers lui, l'air noir, mauvais, alors que tout se fige, se teintant presque en noir et blanc, et qu'il lui crie :

« -Ce passage de notre vie n'a peut-être l'air de rien, mais il nous a profondément marqué ! Pour la première fois, une fille s'intéressait à notre secret, et pour la première fois... - Il prends subitement un air résigné - Nous avons nié... Et nous avons gardé en nous le regret de n'avoir jamais pu profiter de l'occasion qui nous était offerte ! »

Les paroles criées du jeune homme résonnent comme dans une salle fermée et vide. L'adulte le regarde avec effarement. Il fait des grands yeux emplis de compréhension, mais aussi de larmes. Il ne répond pas, alors que le jeune Thomas semble à nouveau tout calme, comme si la rage qu'il avait vis à vis de ce moment venait de s'évacuer d'un coup.

L'adulte finit alors par reprendre la parole :

-Tu sais bien pourquoi je n'ai rien fait ce jour-là, et les suivants.
-Non.
-Elle aurait pu nous prendre pour un malade...
-Nous n'en savons rien.
-C'est vrai qu'elle nous a dit cette phrase qui sous-entend qu'elle pouvait comprendre...
-Arrête...
-... Mais ça ne veut pas dire qu'elle aurait compris...
-Tu n'y crois pas une seule seconde !... Parce que je n'y crois pas non plus ! À aucun moment de notre vie nous avons pensé que tenter notre chance aurait été une erreur ! Bien au contraire, nous avons accumulé regrets après regrets tout au long de notre vie !
-Et alors ?! On ne peut rien y changer !
-Justement, si...
-Comment ça ?! »

C'est alors que le Thomas adulte semble être attiré par une force invisible et impossible à combattre, il rejoint alors son corps d'adolescent.

Pendant quelques secondes, il regarde à nouveau ses mains, il comprend tout de suite ce qui est en train de se passer. Et après quelques secondes, il voit à nouveau l'horloge de son salon contre le mur de la maison, et l'aiguille arrive à nouveau sur 14h17, et sonne une nouvelle fois, et elle disparaît...

Le temps reprend son cours, les oiseaux chantent à nouveau, Géraldine se balance toujours lentement. Thomas est à nouveau perdu dans ses pensées, et plus exactement, il fixe les petits pieds de Géraldine. Celle-ci s'arrête en riant :

« -T'es bizarre quand même ! »
-Pourquoi ?
-Je sais pas. Souvent, quand je te regarde après un long silence, tu as systématiquement les yeux rivés sur le sol...
-Ah oui ?, demande-t-il en relevant la tête, pourtant je...
-En fait, ce n'est même pas le sol. J'ai l'impression que ce sont mes pieds que tu regardes... »

à nouveau, le silence s'installe. Thomas réfléchit, les pensées se bousculent dans sa tête :

«Si je lui dis, elle va me prendre pour un fou, et je ne pourrai plus observer ses jolis pieds des journées entières... Et si je perdais tout ça ?...»

Il répond alors :

« -Non, pas du tout, je regarde juste le sol, parce que je ne sais pas quoi dire... C'est tout...
-Ah bon ? Tu es sûre ? Tu sais, je ne dis pas ça pour t'embêter, ça ne me dérange pas. Je trouve même ça plutôt mignon ! »

à nouveau, Thomas réfléchit intensément, il continue de regarder Géraldine dans les yeux, même si ses envies veulent le pousser à baisser la tête :

«Mais si jamais elle me comprend, alors peut-être que je pourrais... Vivre vraiment ! Peut-être que je pourrais en profiter... Après tout, qu'est-ce que j'ai à perdre ?! »

Après une grande inspiration, il sourit en direction de son amie, et lui répond :

« -Ah oui ? Eh bien, pour tout dire... Tu as raison ! »

Cette phrase semble avoir demandé un effort surhumain à Thomas, qui respire de plus en plus fort. De son côté, elle descend de sa balançoire, et s'assoit à côté de lui, se reposant sur ses bras, jambes tendues, ses pieds pratiquement au même niveau que ceux de Thomas, qui les regardent, alors qu'elle agite ses orteils, avant qu'il finisse par la regarder de nouveau dans les yeux. Elle sourit :

« -Vraiment ? Tu aimes les pieds ? »

Tout gêné, il répond, rouge comme une tomate, il bouge ses mains dans tous les sens, comme s'il mimait, et cherche ses mots :

« -... Oui ! Mais euh... J'aime, les pieds des filles seulement hein ! Parce que ceux des gars c'est... Bah, ça me dit pas.
-Hihi, t'es tout rouge, c'est trop mignon.
-Ah oui tu trouves ?! Ahahahah »

Géraldine se redresse un peu, et passe un doigt sur la joue de Thomas :

« -Oui, je trouve. Et... Qu'est-ce que tu aimes avec les pieds ? »

L'innocence de sa question a un côté très excitant pour le jeune fétichiste, qui ne sait plus ou se mettre, mais paradoxalement, se sent pourtant se plus en plus confiant, notamment après que son amie lui ai gentiment caressé le visage :

« -Tu... Tiens vraiment à le savoir ? »

Elle acquiesce avec un signe de tête. Il se se fait glisser un peu à la force de ses jambes et de ses bras, jusqu'à finir en tailleur en face de Géraldine, face à ses pieds :

« -Je peux ?
-Bien sûr. »

Elle lui sourit à nouveau. Thomas s'avance, et lève les jambes de Géraldine, pour les replacer sur ses cuisses, les deux pieds au niveau de son entrejambe, ce qui l'anime d'une envie incommensurable.

Il commence alors à lui retirer la tong gauche, la faisant glisser vers le haut très lentement, profitant de chaque seconde, et de chaque millimètre de peau se découvrant. D'abord le talon, puis toute la voûte plantaire, et enfin, les orteils. Elle les agite, comme si ils profitaient du vent glissant entre chacun d'eux.

Thomas entreprend alors de lui enlever l'autre tong, avec le même soin, et la même patience. Il se découvre petit à petit, le plaisir grandit, jusqu'à ce que le pied droit soit aussi nu que le gauche. Géraldine a le même réflexe consistante à agiter ses orteils, ce qui ne fait qu'exciter davantage le jeune homme, à un âge où il en faut peu pour être dans tous ses états.

Il sent la peau chaude de Géraldine à travers le tissu. Il lève sa main droite, et la repose sur son cœur, qui bat désormais la chamade. Le monde semble plus coloré, l'odeur des fleurs envahit les narines de Thomas, qui hume leur parfum bien qu'elles soient toujours aussi invisibles, et ses yeux se perdent dans le regard de Géraldine, qui le regarde toujours avec ce même sourire charmeur qui le désarmait à tous les coups à l'époque, et qui est toujours aussi efficace après tout ce temps sans l'avoir revu.

Elle semble heureuse de voir le bonheur qu'elle lui apporte juste en lui laissant ses pieds entre les mains, elle rougit elle aussi, ce que ne manque pas de lui faire remarquer Thomas :

« -Tu es gênée ?
-Non, pas du tout... Je suis juste curieuse de voir la suite... »

Thomas dépose alors délicatement ses mains sur ses pieds, un peu froids. Et alors, en commençant par la gauche, il fait glisser un doigt sous la plante de pied tendue de son amie, qui ne manque pas de plisser, tout en lâchant un petit rire craquant. Encouragé par cette réaction, et par le fait que son pied reste en place malgré tout, il recommence, le faisant glisser du talons jusqu'aux orteils, avec une extrême lenteur, qui se révèle assez efficace, et qui démontre une sensibilité certaine chez Géraldine. Elle continue de rire en gardant la bouche fermée, et agite à nouveau les orteils lorsqu'il a finit son aller-retour.

Il refait exactement la même chose sous l'autre pied, avec le même succès. Là encore, ses pieds bougent très peu, laissant le loisir à Thomas de poursuivre son exploration.

Un tient fermement la cheville gauche, et fait courir ses cinq doigts dessous, d'abord subtilement, puis en insistant de plus en plus. La réaction se veut plus vive, Géraldine rit bien plus fort, et essaie de retirer son pied en vain :

« -Aaaah, ça chatouille !
-Je sais bien
-Sadique ! »

Il ne compte pas s'arrêter là, et tient l'autre pied, sous lequel ses cinq doigts courent avec la même célérité, insistant cette fois au centre et sous les orteils de la pauvre adolescente qui se penche en arrière, et rit à gorge déployée, pour le plus grand plaisir de son bourreau. Malgré tout, il n'a pas trop de mal à garder le pied en place, montrant qu'elle ne se débat pas tant que ça.

Il lui vient alors une idée : Tandis qu'elle reprend son souffle, il se met à genoux sur ses jambes, il l'entend alors dire, lorsqu'elle s'en rend compte :

« -Oh non... Pas ça... »

Il gratte alors sous les deux pieds nus qui lui sont ainsi offerts avec sadisme, ne laissant pas un millimètre sans grattouilles, et insistant sur chaque point faible localisé. Géraldine rit juste quand il s'agit du talon, elle gesticule en doublant de volume lorsque le centre de la plante et les côtés sont touchée, et elle en vient à supplier lorsque Thomas s'attarde sous ses ravissant petits orteils qui plient et se déplient comme au rythme du balancier d'une pendule, sous les assauts répétés de Thomas, qui vit ce qui aurait pu être l'un des meilleurs instants de sa vie, mais se révèle être tout aussi jouissif dans la mort.

Il ne laisse aucun répit durant une durée indéterminée. Géraldine n'en peut plus, elle se débat toujours, mais semble prendre assez de plaisir pour ne pas engueuler son ami, et pour ne pas tenter de le renverser, ou de lui chatouiller les côtes pour lui faire perdre l'équilibre. Elle se contente de subir, ayant bien conscience du plaisir qu'elle lui apporte.

Au bout d'un moment, il se dit qu'il l'a assez torturée, alors il se remet en face d'elle, en tailleur, et reprend ses pieds sur ses cuisses, elle se remet droite en s'appuyant sur ses bras, et le regarde en respirant vite et fort :

« -Alors c'est ça que tu aimes en vrai ? Les chatouilles. Je crois qu'on ne m'avais jamais fait autant de chatouilles de ma vie.
-Et moi, je n'avais jamais chatouillé les pieds d'une fille par le passé...
-C'est vrai ? Demande-t-elle, interloquée.
-Oui. Je n'ai jamais osé avant toi... »

Elle semble très touchée par ce qu'elle vient d'entendre, et lui répond alors :

« -Je suis la première dans la confidence ?
-Oui...
-Trop cool ! - Sa réaction joviale surprend Thomas très agréablement – Ne t'en fais pas, je garderai le secret, tu peux me faire confiance. Et tu pourras t'amuser avec mes pieds, aucun souci.
-Vraiment ?... Je ne sais pas quoi dire. Tu es une fille géniale... - Le regard dans le vide - J'aurais jamais pensé que tu réagirais comme ça...
-Pourquoi pas ?
-Eh bien, je ne l'avais jamais dit... Du coup, je ne savais pas du tout comment la première personne qui le saurait réagirait.
-Eh bien comme ça t'es fixé ! - Dit-elle en riant et en secouant à nouveau les orteils - Par contre, les guilis, c'est dur à supporter au bout d'un moment... Enfin, c'est plus compliqué que ça... - Elle regarde sur le côté, puis vers l'horizon – C'est difficile à supporter... Mais en même temps, c'est très agréable de rire comme ça !
-Tu sais, il n'y a pas que les chatouilles, je peux te proposer un massage des pieds si tu le souhaites ?
-Sérieux ? Tu saurais faire ça ? Alors, là, quand tu veux, mes pieds sont à toi ! »

Toujours agréablement surpris par ce qu'il entend, il entreprend de masser les pieds de Géraldine, l'un après l'autre. Il commence par le pied droit, qu'il entoure de ses deux mains, et sur lequel il applique des petites pressions, tout en frottant pour le réchauffer. Cela dure plusieurs minutes, durant lesquelles Géraldine finit en se laissant tomber en arrière, s'allongeant sur le dos, et fermant les yeux pour profiter des bons soins de son ami.

Le temps ne s'écoule pas vraiment, mais le massage dure plusieurs heures, durant lesquelles Géraldine finit presque par s'endormir, poussant de petits gémissent de temps à autre, qui ont le don d'enflammer la libido du jeune homme, autant qu'ils l'attendrissent.

Ensuite, il lui demande gentiment :

« -Alors, tu aimes ?
-Oh ouais... - Elle garde les yeux fermés, totalement reposée – C'est trop bon. Tu te débrouilles super bien avec tes mains.
-Dans ce cas, je t'en referai si tu le souhaites.
-Alors là, te gêne surtout pas, ahah. »

Elle se redresse, et le regarde à nouveau dans les yeux, en souriant. Cette fois, il ne regarde plus ses pieds. Il les dépose à côté de lui, et s'approche d'elle, doucement. Elle s'avance également. Et, doucement, leurs lèvres commencent à se toucher. Les deux adolescents s'embrassent doucement, puis de plus en plus intensément. Il met sa main derrière sa tête, et finit par la pencher en arrière, tout en continuant ses doux baisers, les deux ont les yeux fermés...

D'un coup, Thomas est en train de réfléchir,et se dit :

« Mais, ce n'est jamais arrivé... Je n'ai jamais été avec Géraldine ! »

La pendule sonne à nouveau, tout se fige, redevient noir et blanc, et Thomas se dédouble à nouveau, il parle à sa version jeune :

« -Je n'ai jamais embrassé Géraldine ! Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?!
-Décidément, tu n'as rien compris... - Répond l'adolescent, désabusé – Tu ne vois pas ce qui s'est passé ?
-Quoi, tu vas me faire croire que, juste parce que je lui ai chatouillé les pieds, je peux me la... Être avec elle ?! C'est n'importe quoi !
-Arrête de faire l'enfant ! Tu sais, comme moi, que tu aurais pu être avec elle ! Ces regards ne sont pas nouveau, mais tu n'as jamais réussi à franchir le pas ! C'était ton seul souci, ne comprends-tu pas ? Ce qui a changé, c'est ta confiance en toi. À l'époque, tu n'as pas osé lui dire la vérité, et tu es resté sur l'idée que c'était mieux comme ça, et regarde ce que tu es devenu ! Un sinistre pantin, qui attend la mort dans un patelin paumé, et qui se fond dans la masse. Ce jour-là, ce n'est pas juste ton fétichisme que tu as refoulé, mais tout ce que tu aurais pu être ! La confiance que tu n'avais pas n'a pas seulement influé sur ce point, mais également sur toutes tes ambitions. Tu as gâché ta vie Thomas !
-Alors comment ça se fait que j'ai pu changé le cours de l'histoire à l'instant ?!
-Tu ne l'as pas changé... Tu es juste en train de découvrir ce qui se passe après.
-...Comment ça ?
-Tu es mort, ton histoire n'a pas changé. Tu as fini dans ce lit, dans cette maison, point final. Et moi, je représente ta conscience, celle que tu as repoussé, celle que tu as cherché à ignorer. Je contiens tous tes regrets, toutes tes peines, tous les éléments marquants dans ta vie. Je suis un concentré de tout ce que tu as pu regretter tout au long de ton existence. Et maintenant, je peux enfin te montrer ce que tu aurais pu faire de tes dix doigts !
-à quoi bon, puisque je suis mort ?
-Dans le monde des vivants, tu n'es plus rien... Une coquille vide, tout au plus. Mais ici, tu es en train de découvrir le privilège des morts : Pouvoir revivre ses souvenirs, ainsi que les modifier.
-Comment puis-je les modifier et les transformer en quelque chose qui n'a pas eu lieu ?
-ça s'appelle l'imagination, tout simplement.
-Mais, tout semble pourtant si réel ! Je sentais ses pieds sur moi, j'ai senti ses lèvres, j'ai ressenti cette envie, ce désir de l'avoir pour moi !
-Parce que tu n'es plus qu'une âme. Quand tu es une personne physique, l'imagination est limité par le fait de ne pouvoir sentir ce que l'on imagine. Mais maintenant, cette capacité à rêver, imaginer, et fantasmer est tout ce qu'il te reste, c'est ce qui rend ces moments plus vivants que jamais. Tout au long de tes 87 années d'existence, tu as accumulé des informations, des odeurs, des goûts, des sons, des sensations... Tout est stocké dans ta mémoire. Maintenant, tu as accès à absolument toutes ces choses.
-Mais à quoi me servira la modification de ces souvenirs ? Et pourquoi est-ce celui-ci qui m'apparaît en premier ?
-Ton corps est en paix, parce qu'il est vide... Mais pas ton esprit. Et c'est à toi de faire en sorte de trouver le repos éternel, maintenant que tu es dans l'au-delà. Quant au choix de ce souvenir, je te l'ai dit : Il est à la base de tout ton mal-être. Tu cachais déjà ton fétichisme depuis des années, mais jamais cela ne t'avait manqué. En revanche, ce jour-là, tu as dit adieu à ton fétichisme, mais également à celle qui aurait pu être ta première petite amie, et à la confiance, autant la confiance personnelle que celle envers les autres. Cet événement est celui qui a précipité tous les autres, et a fait de toi ce que tu es. Et maintenant, tu peux enfin profiter, prendre du bon temps, en recréant ton existence, et en effaçant tes erreurs. Est-ce que tu veux le faire ?
-Euh, mais, je...
-Plus de questions ! Est-ce que tu es prêt à vivre la vie que tu aurais voulu avoir, oui ou non ? »

Thomas réfléchissait, ce qui lui arrivait semblait complètement dément. Mais assez rapidement, il se fit cette réflexion :

« Puisque de toute façon j'ai vécu ma vie d'une certaine manière, et que manifestement cela ne m'a pas spécialement réussi, je ne perds rien à refaire ma vie d'une façon qui me convienne le mieux ! »

Alors, il tendit la main vers sa version adolescente, et dit :

« -Oui, je veux continuer de refaire ma vie !
-Alors, c'est parti ! »

Les deux mains se touchèrent, et les deux corps fusionnèrent en un seul. Thomas était de retour avec Géraldine, continuant de l'embrasser langoureusement, et de continuer à découvrir la vie qu'il n'a jamais eu.

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