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- Le rire de Fernandel (suite et fin)
- Épisode 01
Histoire ajoutée le
19/12/2015
Épisode ajouté le
19/12/2015
Mise-à-jour le
03/07/2021
FAUNE ET NAUFRAGE
Et ton rire parcourt toutes les dimensions
Du rire, aigu d'abord puis grave comme un râle,
Il s'effondre et lâche la grand-voile amirale
D'un navire pris dans le flot des perditions.
De ton corps, la coque craque sans rémission,
Tu t'abandonnes à la houle, à ses rafales,
Ne sachant contenir les rauques accents mâles
Où la femme soudain semble faire irruption.
Du naufrage surgit ce masque d'animal
Qui se noie et son irrésistible inflexion
Vient bêler de plus belle en toi, pitre infernal
Qu'on écartèle à vif sur une roue d'Ixion,
La bouche grande ouverte impropre à la diction,
Satire aux pieds de chèvre et aux dents de cheval...
BACCHANALES
Ta voix veut s'étrangler, l'étrangère
Ne sait plus articuler un mot
Et se laisse aller à la rivière
D'un élan, à l'eau folle du flot
C'est tout le corps morcelé qui rote
A la barbe de François Premier
Dont la soldatesque te garrotte
Avec un ricanement troupier
Quand buvant ta détresse au goulot
Tu ne peux qu'étouffer ta prière
Et qu'un imprononçable sanglot
S'enlise impuissant dans le bourbier
De glaire où ton désarroi ribote
Et beugle, singulier sanglier...
INNOCENCE
Voici que je repense au dieu noir qui s'exile
Dans l'accent de Marseille où chante le vieux port
Et que nous hante comme arraché à son île
Dionysos crucifié à la voix de Stentor.
Les hordes fascistes déferlent sur la ville,
Font parler de force les gardiens du trésor,
Détruisant les foyers dans les quartiers qu'on pille...
Mais un rire entre les ruines défie la mort !
Ah pourrai-je garder à jamais cette enfance,
Sa belle cruauté de cristal qui répond
A l'appel douloureux de nos nuits de souffrance ?
En ce siècle qui croit gouverner sa pulsion,
Savons-nous rire encore, et imiter le ton
Léger, Fernandel, de ta suprême innocence ?