Histoire : A kind of magic

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Histoire


Histoire ajoutée le 26/04/2018
Épisode ajouté le 26/04/2018
Mise-à-jour le 03/07/2021

A kind of magic

- Ah tiens, regarde, je me doutais qu’il n’apprécierait pas ton billet. Il nous a fait un mail.

C’est par cette adresse à sa sœur Emma que Pauline introduisit l’histoire qui va nous intéresser aujourd’hui. Deux sœurs parisiennes, étudiantes, qui tenaient un blog à quatre mains depuis 2 ans, avec un certain succès. Restaurants, spectacles, achats en ligne, boutiques, elles ont pris le pli de ne jamais manquer de poster un billet pour relater leurs expériences. Leur style souvent sans concession, mais sans malhonnêteté non plus, bien que souvent très théâtral et vivant, leur valait un public régulier, toujours à guetter leur prochaine publication. Un court reportage sur une chaine de la TNT était leur fait de gloire, mais aussi un joli coup de pouce à leur succès indéniablement mérité. Oh, bien sûr, pas question d’en vivre, mais le trafic sur leur site leur permettait assez de revenus publicitaires pour se permettre quelques extras, et, en particulier, leurs sorties qu’elles ne manquaient jamais de commenter. Petit à petit, leurs publications étaient autant appréciées de leurs lecteurs qu’elles pouvaient être craintes par les victimes d’une mauvaise critique.



Pauline s’approcha pour lire par-dessus l’épaule de sa sœur :
« Mesdemoiselles,

Je prends connaissance de votre critique concernant mon spectacle, et je regrette qu’il n’ait pas su vous divertir comme je l’espérais. Si je peux admettre vous avoir déçues, je suis en revanche très contrarié par vos commentaires sur la qualité de ma prestation. Vous écrivez, je cite « Les trucs de ce magicien sont éculés, déjà vu des dizaines de fois, et il est bien trop facile de deviner la manipulation. Les participants soit disant pris au hasard dans le public ne trompent personne. Dommage de retirer cette magie à la magie ». Je travaille depuis de très longues années à parfaire mon spectacle, et je vous trouve particulièrement injustes sur ce point. Dites que vous n’avez pas aimé, dites que vous vous êtes ennuyées, mais ne dites pas que mes « trucs » sont faciles. Si vous êtes de bonne foi, ce dont je ne doute pas, je vous invite à venir dans mes locaux afin que je vous montre mon matériel, et vous faire participer à un tour afin de vous prouver que les participants que je sélectionne dans le public ne sont pas des complices, mais des spectateurs privilégiés. Nous verrons si mes trucs sont aussi évidents que vous le prétendez.

Espérant que vous aurez la correction de relever ce défi et à votre tour de prouver votre honnêteté, je vous prie d’agréer, Mesdemoiselles, mes salutations distinguées. »


A ce point, quelques explications s’imposent. Une semaine plus tôt, Emma et Pauline s’étaient rendues au spectacle d’un prestidigitateur très en vogue pour le réalisme de ses tours. Sans être encore une vedette, il commençait, grâce à un bouche à oreille favorable, à se constituer une jolie réputation. Et les deux sœurs n’ont pas aimé, et elles l’ont fait savoir, à travers un article plus sévère qu’à leur habitude. Le mail qu’elles ont reçu est aussi la preuve que leurs écrits sont suivis et craints. Si elles ont déjà reçu des insultes, ou même des propositions financières pour émettre un avis favorable, une invitation de ce type est une première.


- On lui répond ?

- Bah oui, quand même. Bon, je reconnais que j’y suis allée un peu fort, mais franchement on s’est fait chier. Les lapins qui apparaissent et les kilomètres de foulards qui sortent de la manche d’un innocent pris au hasard, c’est bon…

- Je ne peux pas vraiment te contredire… Mais il semble prêt à relever le gant. Qu’est ce qu’on propose ?

- Ca me parait compliqué de le lui refuser. Son message est respectueux, il n’est pas d’accord avec ce qu’on a écrit, il veut nous faire changer d’avis, OK, je joue le jeu, même s’il aura du mal à me convaincre.

- OK, je réponds.

Après quelques échanges de mail, rendez vous fut pris pour le jeudi suivant. Il a été convenu de se retrouver à l’adresse fixée par le magicien pour 17h. Les filles auraient pu être un peu anxieuses de se retrouver seules avec un inconnu, mais le fait d’être ensemble les rassuraient, et elles avait pris la précaution d’annoncer leurs intentions sur leur page Facebook. Si quelque chose devait mal tourner, leur communauté saurait s’en inquiéter. Elles voyaient le côté positif de la chose : un spectacle gratuit, exclusivement pour elles. Et de toutes façons, elles ne pouvaient pas prendre le risque du refus d’un droit de réponse. Le magicien avait mis peu de conditions, si ce n’est le refus des photos ou des films, pour ne pas voir exposé son matériel et probablement d’éventuels trucages.


- Allo ?

- Bonjour ! Pauline et Emma, du blog des Parisiennes.

- Oui, entrez, 3e étage.

Leur hôte leur ouvrit la porte. Un sourire courtois mais sans cordialité et une tenue quotidienne tranchait avec ce qu’il avait montré leur de son spectacle. Son local de travail était un simple appartement, qui semblait assez vaste. D’un geste, il les invita à le suivre dans une pièce qui s’avérait être un bureau, très luxueusement décoré.


- Un bureau ? Je ne m’attendais pas à cela pour un magicien, osa Pauline.

- Vous savez, dans cette profession, vivre des spectacles est une illusion qui ne nous trompe pas. On fait quelques spectacles d’école, quelques mariages, des séminaires d’entreprise, mais c’est insuffisant. Je fais aussi du coaching de cadres supérieurs.

- En somme, vous leur apprenez à faire illusion !

- Je vois que vous avez de l’humour, et pour être honnête, cela me plait. Je ne pensais pas que vous répondriez à cette invitation. Mais puisque vous êtes là, je vous dis droit dans les yeux que vous avez été injuste avec moi. On ne peut pas balayer d’un revers de main des années de travail sans savoir. Je lis régulièrement votre blog, et je vous ai rarement connues aussi cassantes et injustes.

- Je peux comprendre que mon article ne vous ait pas plu, mais je n’ai pas pour habitude de déformer mon ressenti. Je me suis ennuyée, j’en suis désolée, mais c’est un fait. Rien ne m’a surprise dans tout ce que vous avez fait.

- Et vous prétendez avoir repéré mes trucs ? êtes-vous bien certaine de cela ?

- Heu… Je ne suis pas moi-même prestidigitatrice, mais reconnaissez qu’il n’y a rien de surprenant dans ce que vous faites. Vos membres du public soit disant pris au hasard, ça ne trompe plus personne, et franchement, ils surjouaient tellement…

- Moi je suis prêt à vous mettre au défi. Un tour devant vos yeux, à un mètre de distance, réellement spectaculaire. Et après vous m’expliquez. Si vous y arrivez, je serai le premier à publier un mea culpa en commentaire sur votre blog. Sinon, vous publierez votre nouvel avis. Vous marchez ?

- Donc on s’installe, et on vous regarde transformer une assistante en lapin ?

- Je n’ai pas d’assistante. Je vous propose la seule participante prise au hasard possible : votre amie.

- Je suis sa sœur…

- Ah, pardon. Votre sœur. J’espère que vous ne la soupçonnez d’autant moins d’avoir préparé le coup avec moi !

- Moi ça me va… Emma ?

- Oh bah oui, je marche. Mais ne me transformez pas en lapin s’il vous plait !

L’ambiance s’était détendue. Les filles avaient compris que leur interlocuteur n’était pas hostile, mais réellement piqué au vif. S’il n’était plus aussi froid qu’à leur arrivée, il semblait tout de même très déterminé à vouloir donner une leçon à ces deux jeunes insouciantes. Sa réponse allait être une première marche vers leur intrigue.


- Non, pas de lapin. C’est bien trop banal, et cela ne vous a pas convaincu l’autre jour. Je vais plutôt vous couper en deux.

Pauline semblait très amusée, mais Emma un peu inquiète, bien qu’elle se doute qu’elle comprendrait bien vite le fonctionnement de l’illusion. Dans tous ces tours, les phases critiques étaient cachées, et on devinait sans peine qu’avec un peu de souplesse, une assistante n’avait aucun mal à faire croire au public qu’elle était effectivement coupée en deux.

Le magicien se leva, et les filles le suivirent machinalement. Ils arrivèrent dans une pièce assez vaste dans laquelle du matériel était empilé dans un angle. Au milieu de la pièce, une sorte de boite toute en longueur posée sur une table à roulette. C’était sans aucun doute le matériel attendu pour le fameux tour de la femme coupée en deux.


- Cher public, installez-vous ici. Je vais couper en deux votre sœur… heu…

- Emmanuelle. Mais appelez-moi Emma.

- Je ne savais pas laquelle était laquelle. Emma… Eh bien c’est parfait, un prénom coupé en deux, pour une assistante de même. Emma, laissez vous affaire ici, et mettez vous pieds nus s’il vous plait. Oui, vos chaussettes aussi. Je ne veux pas qu’on m’objecte que les jambes coupées sont en plastique.

Mi amusée, mi intriguée, Emma s’exécute. Pauline, quant à elle, est bien décidée à ne rien laisser passer et ne pas se laisser distraire. Cependant, sa sœur Emma qui ne sait pas exactement ce qui va lui arriver est une situation qui l’amuse. Quoi qu’il arrive, il y aura à raconter sur le blog. Le magicien saisit avec douceur la main d’Emma et l’accompagne vers la boite. Il l’allonge, et ferme le couvercle. Elle a passé ses pieds par deux orifices à une extrémité, tandis qu’une pièce en bois vient se placer au dessus de ses épaules. Seule sa tête et ses pieds dépassent, ainsi, sans que cela semble présenter un réel intérêt, ses mains qui peuvent sortir sur les côtés de la boite.

Le magicien fait tourner la boite à 360 degrés pour la remettre en place immédiatement. De façon évidente, rien ne relie la table au sol, et d’ailleurs on voit parfaitement tout ce qui se passe sous ses pieds. Emma ne voit pas toute la scène, mais elle devine dans les mains du magicien deux grandes plaques rigides en métal. Dans ses souvenirs, c’est le moment où elle va se faire couper en deux. Bien qu’elle s’attende à comprendre immédiatement le truc, elle commence à ressentir une certaine anxiété. Pauline, fidèle à son approche initiale, scrute le moindre mouvement du magicien. Rien de suspect ne peut lui échapper.

Un regard confiant pour rassurer Emma, le magicien enfonce la première plaque métallique dans la boite, perpendiculairement à sa longueur, d’un mouvement brusque, qui laisse penser que le corps d’Emma est effectivement coupé de part en part, au niveau de la taille. Une deuxième plaque suit immédiatement la première, juste à côté.


- Voilà, vous êtes coupée en deux. Ca va ?

- Jusqu’ici oui, je survis.

- Prouvez à votre sœur que vous êtes encore en vie, bougez vos pieds et vos mains ?

- Voilà…

- Ah oui, tu ne dois pas être bien coupée en deux ma vieille ! Je vais encore devoir te supporter un moment

- Je vois que nous n’êtes guère impressionnée, mais attendez un peu…

Jusqu’ici, bien qu’elle se soit promis d’être très attentive, Pauline n’avais pas remarqué que la table n’avait pas 4 mais 8 pieds, dont deux paires doublées au centre. En réalité la table était divisable en deux moitiés. Le magicien désolidarise les deux moitiés de table, et brusquement les sépare de 50 cm. Cette fois, Pauline fronce les sourcils. Elle a beau chercher, rien ne lui semble évident. Le magicien commence à arborer un sourire revanchard. Sans laisser de répit à sa seule spectatrice, il écarte carrément les deux moitié de boite d’un bon mettre. Emma, qui quant à elle ne voit rien, intercepte un regard plus que surpris de sa sœur.


- Pauline, qu’est ce qui se passe ?

- Bah…

- Un doute dans votre esprit, Pauline ? Venez vérifier par vous-même…

Pauline se lève. Le magicien lui fait faire le tour des deux boites, passer entre les deux… Aucun doute, pas d’effet d’optique.


- Pauline, répondez à votre sœur, elle attend

- Heu… on dirait qu’il t’a coupée en deux…

- Vérifiez, Pauline, est ce que vous reconnaissez les pieds de votre sœur ?

- Heu… ah, oui, ce grain de beauté sous l’orteil. Merde ! mais comment vous faites ça ?

Pauline était en train de perdre toutes ses belles certitudes. Elle se doutait d’un truc, mais rien ne lui venait. Les faits, c’était plus d’un mètre entre le haut du corps de sa sœur, et ses pieds, qu’elle pensait avoir reconnu. Elle envisageait une complice qui aurait eu connaissance de ce grain de beauté, mais cela semblait absurde, il aurait fallu mener une enquête pour le savoir, et trouver une complice ayant la même particularité… Tout en tâchant de rester persuadée, qu’il y avait un truc, le doute commençait à la gagner…

Le magicien identifia ce doute qui s’installait et cette surprise chez sa spectatrice. Restait à parachever son œuvre, en en faisant de même avec sa partenaire. Sans laisser l’opportunité d’une réflexion supplémentaire, il alla prendre la boite contenant les jambes, ou supposées siennes, d’Emma, pour placer ses pieds tête bêche, à hauteur de ses yeux.


- Et vous, Emma, reconnaissez-vous ses pieds ? Remuez-les, vérifiez autant que vous le voulez…

Emma, incrédule, agita ses orteils. Ceux qu’elle voyait juste sous ses yeux reproduisaient parfaitement le mouvement quel qu’il soit. Cela leva immédiatement ses doutes : ces deux pieds étaient bien les siens, mais dans une position impossible à prendre, quand bien même elle serait contorsionniste. La panique commençait à la gagner…

- Pauline, putain, ce sont vraiment mes pieds ! dis moi ce qu’il se passe, ça devient flippant !

- Heu… je sais pas trop quoi te dire… Vous me faites une blague tous les deux, là ?

- Ah vous vous payez encore le luxe de douter après cela ? Puisque vous êtes si maline et puisque mes tours sont banals et trop devinables, je suis curieux d’entendre votre explication…

- Il n’y en a qu’une possible, vous êtes en train de me monter un gros bateau tous les deux…

- Pauline, sans déconner, tu me fais paniquer, là… dis moi que tu vois un truc, parce que là, ce sont VRAIMENT mes pieds et je te jure que…

- Allez, c’est bon, je reconnais que l’illusion est parfaite, libérez ma sœur, vous voyez bien qu’elle commence à paniquer.

- L’illusion ? Ah mais je constate que vous êtes têtue… Vous n’avez pas compris mais je vais vous aider… Nous, désolé mais je vais laisser votre pauvre Emma dans cet état, à moins que vous acceptiez de vous livrer vous-même à une petite expérience. Quand vous implorerez mon pardon, quand je ressentirai votre réelle conviction, alors je libèrerai votre sœur.

- Une expérience ? quel genre d’expérience ?

- C’est oui ou c’est non ? Vous croyez que l’on peut laisser indéfiniment des jambes séparées du reste d’un corps ?

- Pauline !!! Sans déconner, fais ce qu’il te demande, après tout, c’est de ta faute tout ça !

Le ton avait changé. Emma en réelle panique, des larmes commençait à couler sur son visage. Elle continuait machinalement à agiter ses orteils, impuissante et prisonnière d’une situation qui échappait à sa logique. Pauline, à la fois vexée de ne pas comprendre, mais aussi prise d’empathie pour sa sœur et coincée par le chantage du magicien, n’eut pas le choix.


- OK, allons au bout. Qu’attendez-vous de moi ? Je vous préviens, toute notre communauté est au courant d’où nous sommes, et vous ne pourrez pas vous en tirer si vous nous faites du mal…

- Pff… Il ne s’agit pas de ça… Déchaussez-vous à votre tour et installez vous sur ce fauteuil

- Les chaussettes aussi j’imagine ?

- Oui, bien entendu. Emma, regardez et ne loupez rien du spectacle

- Pauline… fermez les yeux et détendez vous. Faites le vide… Vous sentez une pesanteur vous envahir… Vous sentez que votre corps doit m’obéir… Au compte de 3, vos jambes vont se tendre à l’horizontale, sans effort. Vous serez d’une totale rigidité dans cette position… 1, 2, 3… ouvrez les yeux. Vos jambes sont totalement immobilisées, vous pouvez garder cette position des heures durant sans ressentir de fatigue. Vos talons sont attirés l’un vers l’autre au point de se coller entre eux… Impossible de se décoller… Maintenant, ce sont vos orteil qui vont s’écarter, le plus possible en éventail, comme s’ils ne supportaient pas d’être à côté les uns des autres. Quoi que vous fassiez, impossible de les rapprocher, ni de bouger vos jambes… Au compte de 3, il en sera ainsi jusqu’à ce que je vous libère. 1, 2, 3… Ouvre les yeux, et essayez de remuer les pieds…

- Heu…

- Allez, essayez ! Vous avez plutôt intérêt à pouvoir, car je vais vous chatouiller…

- Je… je ne peux pas, mais ne vous fatiguez pas, je ne suis pas chatouilleuse…

- C’est vrai ? Merci de me prévenir, nous allons arranger cela… Pauline… Ces pieds qui sont les vôtres deviennent subitement d’une sensibilité jusqu’ici inconnue pour vous… Vous devenez extraordinairement chatouilleuse… Même un souffle d’air vous est insupportable… dès que vous entendre le mot « guili », vos orteils s’étireront au maximum en arrière, vous serez totalement paralysée, et deviendrez extraordinairement vulnérable aux chatouilles.

- Bon…, ça va, arrêtez, maintenant…

- Guili…

Sans aucune hésitation, le magicien approcha ses doigts et entrepris de chatouiller sans pitié les pieds de la pauvre Pauline, qui se mit instantanément à hurler de rire. Elle était en effet à peine chatouilleuse, mais de toute évidence, le magicien avait avec ses seuls mots totalement modifié cet état de fait. Emma, toujours coupée en deux, en oubliait presque son propre cas, à son tour interdite par ce spectacle surréaliste : sa sœur, suffoquant dans d’incroyable explosions de rire, agitant tout le haut de son corps pour tenter d’échapper à son supplice, mais les pieds totalement immobiles comme s’ils ne ressentaient rien… Pourtant ses rires ne semblaient pas feints… C’était comme… une sorte de magie… Marquant une petite pause, le magicien laissa une toute petite occasion pour que Pauline puisse s’exprimer.


- Pitié ! pitié ! c’est insupportable ! Je regrette d’avoir douté de vous ! C’est sincère ! Arrêtez cela, c’est insupportable !

- Vous êtes en train de pleurer sur votre sort… vous vous fichez bien du reste… Vous ne pensez même plus à votre sœur touchez coupée en deux… Assumez ! Vous vous êtes mise toute seule dans cette situation. Quand vous sortirez d’ici, vous serez à vie convaincue de ma puissance et de mes possibilités.

- Mais je suis convaincue ! convaincue ! Que voulez vous que je fasse de plus ! Pitié, arrêtez, nous sommes convaincue toutes les deux… Recollez ma sœur, ou je ne sais pas comment vous appelez ça, et arrêtez de chatouiller mes pieds. Je regrette… Je vous jure que je vais écrire un démenti sur notre blog dès ce soir…

- D’accord, j’arrête de vous chatouiller. Je vais faire mieux, regardez…

Le magicien s’approcha des pieds d’Emma, toujours prisonniers. Celle-ci crispa ses orteils quand elle devina, mais le magicien lui fit un sourire rassurant. Il se mit pourtant à chatouiller les pieds d’Emma… Mais ce fut Pauline qui explosa de nouveau de rire.

- Ah ! Ah ! Ah ! Mais arrêtez ! c’est quoi ce délire encore ! Pitié ! Vous êtes fou ! Arrêtez cette torture ! Je vous en implore ! C’est atroce ! Ah ah ha ! Pitié ! pitié !

- Magicien, s’il vous plait, je crois qu’elle a sa dose… Vous nous avez convaincues. Nous n’avons pas compris ce qu’il se passait ici, mais maintenant laissez nous partir… S’il vous plait…

La douceur d’Emma attendrit le magicien, qui cessa son tourment. Il sembla se désintéresser du sort de Pauline, pour s’occuper d’Emma. Il rapprocha les deux moitié de table, les fixa entre elle, et retira une a à une les deux plaques de métal. A cet instant précis, Pauline retrouva totalement sa liberté de mouvement. Epuisée, elle resta tout de même assise dans le fauteuil le regard perdu. Elle ne vit pas à ce moment là le magicien chuchoter quelques mots à l’oreille d’Emma, qui lui répondu simplement « entendu ».

Emma, libérée de sa boite, se rechaussa, et Pauline qui n’avait pas osé bouger, en fit de même. Elles suivirent machinalement le magicien qui retourna à son bureau, comme à leur arrivée. Après quelques instants, ce fut Pauline qui rompit le silence.


- Magicien, vous êtes un personnage surprenant. J’ai vécu une expérience insupportable, mais je dois reconnaitre que vous m’avez convaincu. Et deux fois, même.

- Magicien, il y a un truc, n’est ce pas ? vous ne m’avez pas…

- C’est à vous de me dire… Vous l’avez vécu, ressenti, vu…

- Je… Je ne sais pas… Je ne sais plus…

- Vous ne nous avez pas tout dit, vous n’êtes pas que coach, vous pratiquez aussi l’hypnose…

- Une sorte d’hypnose, oui. Mais je vous laisse vous faire votre opinion sur ce que vous avez vécu et vu toutes le deux. Et notre marché ?

- Je vais dès ce soir réécrire le billet qui vous critiquait. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais je reconnais mon erreur et le manque d’honnêteté de mon article. Franchement, je pense que je vais arrêter ce blog. Cette expérience m’a secouée…

- Je vous invite au contraire à continuer. Votre travail est utile et intéressant. Mais souvenez vous de cette expérience, et si le cœur vous en dit, revenez à mon prochain spectacle.

- Si vous avez besoin d’une participante pour être coupée en deux… s’il vous plait oubliez-moi !

L’humour d’Emma acheva de détendre l’atmosphère, qui demeurait cependant étrange pour les deux sœurs. Elles prirent congé du magicien, et rentrèrent chez elles, sans parler de leur expérience. Le soir même, ce fut Emma qui écrivit un nouvel article qu’elle intitula malicieusement « Il m’a sciée… ». Le tort causé était réparé.



Epilogue



Quelques temps plus tard, Emma et Pauline étaient à l’aquaboulevard, évidemment non seulement pour profiter d’un moment de détente, mais comme à leur habitude en vue d’un nouvel article sur leur blog, qui promettait d’être très positif, tant l’expérience leur plaisait. Installées seules dans un spa, et se faisant face, elles échangèrent leur point de vue :


- C’est vraiment cool, ici, hein ?

- Mais carrément ! Tout le monde dit que c’est bondé, mais là on n’a vraiment pas de quoi se plaindre. Et puis l’eau est bonne, la température extra.

- OK, au moins on risquera moins les remontrances que la dernière fois !

- Ah ah ! C’est clair… Sans déconner, ce type m’a carrément fait changer d’avis sur lui comme personne auparavant. Je ne suis pas près de l’oublier.

- Ca, tu ne crois pas si bien dire…

- Hein ? qu’est ce que tu veux dire ?

- « Guili »…

Emma avait malicieusement prononcé ce simple mot… Avant que Pauline n’ait eu le temps de s’interroger sur ce qu’elle voulait dire, elle compris. Sans aucun contrôle de sa part, ses jambes se tendirent hors de l’eau, ses talons joints, ses orteils écartés, ses plantes de pieds tendues autant que possible, et son regard suppliant n’y changea rien : Pauline approchait déjà ses ongles remuant des pieds de sa sœur…

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